I. Faire un exposé consacré au Mont Athos est une tâche ardue. Et sa difficulté ne provient pas uniquement du fait que l’on a déjà tant écrit à propos de la Sainte Montagne. Une vaste littérature existe en effet au sujet de l’Athos, rédigée en diverses langues et dans les genres les plus variés. En premier lieu, il y a les descriptions des voyageurs et visiteurs du Mont Athos3. La plus ancienne appartient au hiérodiacre russe Zosime de Novgorod, qui visita l’Athos en 1420 et laissa une brève description de son voyage. Le récit suivant fut rédigé par l’italien Buondelmonti qui visita le Mont Athos au milieu du XVe siècle. Depuis lors et jusqu’à nos jours, de telles descriptions n’ont pas cessé. D’autres ouvrages sur l’histoire, l’archéologie, l’art, le droit4 et la vie monacale de l’Athos peuvent être ajoutés à cette masse d’impressions des voyageurs …
Une telle production littéraire souligne incontestablement l’intérêt vif et continu envers cette contrée monastique durant les derniers siècles et jusqu’aujourd’hui, tant du côté oriental qu’occidental du monde. Mais tous ces livres sont d’habitude entachés de nombreuses inexactitudes et ne donnent pas un tableau complet du Mont Athos en général et de sa vie spirituelle en particulier, et c’est pourquoi la Sainte Montagne constitue encore, aux yeux de beaucoup, un mystère et une interrogation. Des points de vue diamétralement opposés ont été exprimés à son sujet. Une telle différence d’appréciation peut largement s’expliquer par le fait que la majorité de ces témoignages se fondent sur des visites de courte durée de personnes ignorant non seulement la langue locale, mais aussi presque tout de l’Église orthodoxe, du monachisme oriental et de sa vie spirituelle. Il n’est pas rare que même des travaux sérieux et scientifiques sur le Mont Athos — comme, par exemple, le long article de Karalevsky dans le Dictionnaire d’Histoire et de Géographie Ecclésiastiques5 — soient truffés d’erreurs et d’inexactitudes6 qui n’auraient jamais été tolérées dans un travail historique sur n’importe quel autre sujet ; sur le Mont Athos, par contre, chacun estime avoir le droit — on ne sait trop pourquoi — de dire tout ce qui lui passe par la tête. A contrario, comme exemple d’ouvrage sérieux et objectif, rassemblant avec bonheur les impressions du voyageur et l’aperçu historique, on peut mentionner l’excellent travail du prof. Dawkins, Les Moines du Mont Athos7. Néanmoins, même cet ouvrage n’est pas exempt d’inexactitudes et n’examine pas en profondeur la vie spirituelle des moines.
Dans le présent exposé, je me limiterai à quelques réflexions sur la place du Mont Athos dans la vie spirituelle de l’Église orthodoxe dans le passé et le présent. Je suppose que tous, ici, connaissent dans ses grandes lignes l’histoire de la Sainte Montagne, et c’est pourquoi il n’est pas indispensable de s’y arrêter en détail.
Le Mont Athos existe en tant que contrée monastique vraisemblablement depuis les VIIe-VIIIe siècles. Son apparition peut être liée à la conquête musulmane de l’Égypte, de la Palestine et de la Syrie et à la diffusion de l’hérésie monophysite dans ces pays. Après la perte de l’Orient, le centre du monachisme orthodoxe se déplaça vers le Mont Athos, bien que ce processus ait exigé un temps assez long pour être parachevé. C’est ainsi qu’au IXe siècle, nous voyons seulement les premiers éléments d’une vie monastique organisée sur le Mont Athos sous la forme de petits couvents avec une autorité centrale. Le premier grand monastère, la Laure de saint Athanase, fut fondé en 963. Vers 972, apparaît la première Charte statutaire commune de la Sainte Montagne, appelée " Tragos " (c-à-d. " bouc ", parce que rédigée sur un parchemin en peau de bouc), signée par saint Athanase et l’empereur Jean Tzimiskès8. Aux XIe-XIIe siècles, le Mont Athos était déjà largement organisé, avec un grand nombre de monastères de types divers, une administration centrale et des moines des différentes nationalités : grecque surtout, mais aussi géorgienne, bulgare, russe et serbe. Même les Latins y avaient le monastère de Sainte-Marie-d’Amalfi. Celui-ci pratiquait le rite latin, mais relevait de la juridiction du patriarche de Constantinople, y compris après la séparation de l’Occident d’avec l’Église orthodoxe. Cette période, qui se prolonge chronologiquement jusqu’aux invasions latines de l’Orient, à la soi-disant quatrième croisade, à la conquête de Constantinople par les Latins (1204) et à la fondation du royaume latin à Thessalonique, peut être considérée comme l’une des plus florissantes dans l’histoire du monachisme athonite. Plus de deux cents monastères étaient dispersés sur tout le territoire de la Sainte Montagne. La population monastique était alors, apparemment, plus importante qu’à toute autre époque. Certains historiens évoquent même jusqu’à 50 000 moines vivant au Mont Athos ; ce nombre nous paraît cependant fortement exagéré, et il est plus vraisemblable de considérer que la population de ce temps atteignait 15 000 moines. Spirituellement, cette période est marquée par la grande figure de saint Athanase de Trébizonde († ca 1000). Sage organisateur de la vie cénobitique, remarquable maître spirituel, il fut une personnalité aux larges vues. Par sa sainteté et sa sagesse, saint Athanase réussit à attirer au Mont Athos des moines de toutes les parties du monde. Il avait des relations particulièrement étroites avec les Géorgiens (ce qui s’explique, peut être, par le fait que sa mère était géorgienne) et avec les Latins. Grâce à son soutien, le monastère d’Iviron (géorgien) et le monastère latin furent fondés sur la Sainte Montagne. Le monastère d’Iviron devint bientôt un centre majeur de la culture géorgienne, où bien des livres furent traduits en géorgien. La règle de la Laure, élaborée par saint Athanase, porte les traces de la règle de saint Benoît9. On peut probablement y reconnaître l’influence du monastère latin voisin. Une telle conception supranationale de la Sainte Montagne, en tant que centre du monachisme orthodoxe universel et surpassant les distinctions nationales, peut être considérée comme le testament de saint Athanase pour toutes les générations futures de moines athonites.
Cependant, à cette période (Xe-XIIe siècles), le Mont Athos ne jouait pas encore un rôle considérable dans l’histoire de la spiritualité orientale. L’on ne peut douter du fait que le niveau spirituel des monastères était, alors, assez élevé dans l’ensemble, mais très peu d’écrits spirituels nous sont parvenus des moines athonites de cette période. À l’exception de la vita admirable et parfaitement historique de saint Athanase10 et de quelques règles à caractère plutôt juridique, la seule œuvre spirituelle marquante de ce temps est la vita de l’ermite saint Pierre l’Athonite11. Bien qu’elle manque de données historiques, elle est remarquable en tant qu’exposition précoce de la spiritualité hésychaste, et par sa vénération particulière de la Mère de Dieu en qualité de Protectrice de la Sainte Montagne. Plus tard, au XIVe siècle, saint Grégoire Palamas s’est servi de cette vita et l’a littérairement retravaillée en vue de son apologie de l’idéal hésychaste12. À cette époque, prédominait au Mont Athos le mode de vie cénobitique dans de grands monastères, et peut-être est-ce une des raisons de son improductivité dans le domaine de la littérature spirituelle. Saint Jean Climaque avait déjà remarqué un phénomène semblable chez les moines pachômiens. En tout cas, les grands écrivains spirituels de cette époque n’appartiennent pas au Mont Athos, comme, par exemple, le grand mystique et éminent écrivain, contemporain un peu plus jeune que saint Athanase : saint Syméon le Nouveau Théologien († 1022)13 et son disciple Nicétas Stétathos, qui vivaient tous deux à Constantinople, ainsi qu’Élie l’Ecdicos, Philotée du Sinaï, etc.
Le Mont Sinaï (malgré son isolement en Orient) et Constantinople continuent, aux Xe-XIIe siècles, à être les centres du mysticisme, mais l’Athos se prépare déjà à recevoir leur héritage et à développer leurs doctrines spirituelles, ce qui se réalisera aux XIIIe-XVe siècles.
Du point de vue spirituel, les XIIIe-XVe siècles constituent la meilleure période du Mont Athos, bien qu’extérieurement cette époque abonde en désastres. Mentionnons, au XIIIe siècle, les invasions et pillages des croisés latins, qui construisirent même une forteresse particulière aux frontières du Mont Athos, appelée " Frankokastro " (le " Château des Francs «), pour accomplir plus aisément leurs pillages sur la Sainte Montagne. Plus terribles encore furent les dévastations commises par les mercenaires catalans, qui, au début du XIVe siècle, brûlèrent sur le Mont Athos des monastères entiers avec leurs moines. Les pillages des Turcs datent de la fin du même siècle. Sans oublier les persécutions de l’empereur Michel VIII, qui tenta par la force d’imposer l’union avec Rome. Toutes ces calamités qui s’abattirent sur le Mont Athos eurent pour conséquence naturelle le renforcement et le développement d’un préjugé antiromain, qui est depuis ce temps-là une caractéristique de ses moines. Spirituellement, cependant, le Mont Athos s’est épanoui dans ces rudes épreuves et est devenu le centre d’un des plus grands mouvements mystiques dans l’histoire de l’Église orthodoxe, connu sous le nom d’ » hésychasme «. Ce terme provient de celui d’hesychia, qui signifie littéralement » repos " (ou " silence «). Cette expression désigne l’état de repos mystique, quand l’homme se libère de l’action de l’imagination et de la distraction des idées, et, par la prière, se concentre tout entier sur son être intérieur, ce qui contribue à une communion plus pure avec Dieu et à la perception de la grâce de l’Esprit Saint. Il ne faut aucunement confondre cet état avec ce qu’en Occident on appelle du nom de » quiétisme «.
Dans cette spiritualité, il n’y a rien de particulièrement nouveau, si ce n’est l’intensité de ce mouvement au XIVe siècle et sa large diffusion tant parmi les moines que les laïcs. Pour l’essentiel, il s’agissait de l’ancienne tradition contemplative et mystique du monachisme oriental, déjà représentée aux IVe-Ve siècles par Évagre et Macaire. Cette ancienne doctrine de la vie contemplative, aspirant à la vision de Dieu, a subli une forte influence, à partir du Ve siècle et par la suite, de la théorie et de la pratique de ce qui fut appelé la » prière de Jésus «, qui représente une forme de prière mentale, concentrée sur le nom de Jésus. Le Mont Athos n’a pas inventé cette prière. Ses centres les plus anciens furent, apparemment, la Palestine, l’Égypte et, particulièrement, le Mont Sinaï, d’où elle s’est répandue dans l’ensemble du monde orthodoxe, en pénétrant même de larges cercles laïcs. Elle a atteint l’Athos sous une forme déjà développée et, probablement, définitive, avec son texte traditionnel formulé comme suit : » Seigneur Jésus-Christ, Fils De Dieu, aie pitié de moi «14. L’on estime généralement que la contribution du Mont Athos au développement de cette prière consiste en l’élaboration de sa partie psychotechnique. Nous avons en vue la liaison de la prière continue au rythme de la respiration, la concentration de l’attention dans le cœur, qui est considéré comme le centre de l’activité spirituelle, ainsi que la position du corps pendant la prière (comme, par exemple, la station assise sur un siège bas, avec la tête inclinée, de sorte que le menton touche la poitrine). Nous ne pouvons, cependant, accepter l’idée que toute cette » psychotechnique «, si importante dans la spiritualité orientale, ait été » inventée " par les moines athonites15. C’est là plutôt le produit d’une longue expérience ascétique, qui a appris aux moines l’efficacité de ces moyens dans le domaine de la concentration de l’attention sur l’objet de la prière, et pour la prévention de la distraction des pensées et de l’imagination. Cette pratique d’ancienne origine n’est pas limitée au Mont Athos. Ainsi, nous trouvons déjà dans les Homélies spirituelles, attribuées à saint Macaire le Grand16 (IVe-Ve siècles), la doctrine de la place centrale du cœur dans la vie spirituelle. Chez saint Jean Climaque (VIIe s.), Hésychius du Sinaï (VIIIe s.) et d’autres, l’on trouve beaucoup d’indications sur le rôle de la respiration dans la prière, tout comme sur d’autres procédés corporels. Le document ascétique le plus ancien décrivant en détail la " technique " ou " l’art " de la prière, le Traité sur la prière et l’attention, attribué à saint Syméon le Nouveau Théologien, n’appartient visiblement pas au Mont Athos17. Bien que son authenticité ne soit pas établie, chronologiquement il se rapporte aux Xe-XIe siècles et, géographiquement, il provient probablement de Constantinople. Sur l’Athos, l’on rencontre pour la première fois cette forme de la prière de Jésus dans les écrits de saint Nicéphore le Moine, qui vivait dans la deuxième moitié de XIIIe siècle. Dans son œuvre Sur la sobriété et la garde du cœur18, saint Nicéphore décrit très précisément l’action du cœur dans la prière, de même que le rôle de la respiration. Remarquons que saint Nicéphore était d’origine occidentale, italienne probablement, et s’était converti à l’orthodoxie. Il prouva sa fidélité à l’Église orthodoxe durant les persécutions de l’empereur uniate Michel Paléologue, et est vénéré sur le Mont Athos en tant que confesseur. L’origine latine de Nicéphore explique peut-être son intérêt particulier pour les questions physiologiques et un large usage des descriptions corporelles (par exemple, du cœur) dans ses écrits ascétiques. Son activité n’eut cependant pas, semble-t-il, d’influence majeure sur les moines athonites. Le grand ascète du XIVe siècle saint Grégoire le Sinaïte († 1346) doit être considéré comme l’initiateur principal d’un important renouveau spirituel sur la Sainte Montagne. À son arrivée à l’Athos, après un long séjour dans divers monastères d’Orient, Grégoire trouva sur la Sainte Montagne — comme il l’affirme lui-même — beaucoup d’hommes vertueux et pieux, mais très peu d’authentiques contemplatifs, connaissant la prière du cœur dans ses degrés supérieurs. Et même ceux-là avaient acquis la prière uniquement par la pratique, ne connaissaient pas sa théorie et étaient incapables de l’enseigner à autrui. Saint Grégoire lui-même avait appris la prière de Jésus sur le Mont Sinaï, et surtout à Chypre auprès du saint starets Arsène. Il faut remarquer que cette prière se transmettait toujours via un enseignement personnel. Saint Grégoire le Sinaïte réussit, par son autorité personnelle et ses écrits, à créer sur le Mont Athos un fort renouveau de la vie spirituelle. Ce fut l’école contemplative, fondée essentiellement sur la pratique de la prière de Jésus sous sa forme la plus élaborée et technique. À partir de ce moment et pour longtemps, l’Athos devint le centre spirituel et même théologique de l’Eglise orthodoxe, avec une immense influence sur l’ensemble du monde orthodoxe. Saint Grégoire entreprit une série de voyages missionnaires dans les pays orthodoxes en vue de diffuser ses idées sur la vie contemplative et la prière continuelle. Dans son œuvre de renouveau spirituel, il fut aidé activement par un autre grand saint de l’Athos, Maxime le Capsocalyvite. Il existe quatre vitae de ce saint, publiées il y a quelques années dans les Analecta Bollandiana19. Saint Maxime, à la différence de saint Grégoire, était un homme simple, sans éducation. Il n’a pas laissé d’œuvres écrites, mais était un porteur authentique de la grâce de l’Esprit-Saint. C’était un charismatique, un homme doué de prescience et un thaumaturge. Cet homme simple était profondément instruit des questions les plus subtiles de la vie spirituelle. Il éprouvait un vif intérêt pour les discussions théologiques de son temps et y occupait une position très précise. Néanmoins, ce n’est pas dans les livres qu’il avait acquis la grâce de la prière ininterrompue. Elle lui fut octroyée comme un don spécial de la Mère de Dieu. Avec saint Maxime le Capsocalyvite, réapparut sur le Mont Athos un ancien thème mystique de la spiritualité orientale : celui de la vision de la lumière divine, qui occupait une place centrale dans l’expérience mystique et la doctrine de Macaire et de saint Syméon le Nouveau Théologien. Dans les vitae de saint Maxime, il y a beaucoup de descriptions d’une telle vision, " vision invisible «, comme il le dit lui-même, suprasensible et immatérielle, mais néanmoins objective et authentique, de sorte qu’un des disciples du saint — Marc le Simple — put même voir une fois saint Maxime entouré d’un nuage de feu pendant la prière. Parfois, cette vision de la lumière était accompagnée d’une perception de parfum suprasensible. L’enseignement de saint Maxime sur les états extatiques, quand cesse toute prière, est également capital. Ici, saint Maxime se rapproche du grand mystique syrien du VIIIe s., Isaac de Ninive20.
Avec saint Grégoire Palamas, le mouvement hésychaste entre dans la période des discussions dogmatiques et des élaborations théologiques21. Saint Grégoire Palamas, qui décéda en 1359 étant archevêque de Thessalonique, fut, toute sa vie durant, étroitement lié au Mont Athos. Il y devint moine à l’âge de 21 ans, après avoir quitté Constantinople, où il était né dans une famille notable et avait reçu une brillante formation. Il vécut longtemps sur le Mont Athos, fut pendant trois ans l’higoumène du monastère cénobitique d’Esphigménou, mais renonça à l’higouménat par amour de l’hesychia (le silence) et vécut en ermite dans les alentours de la Laure de saint Athanase. Il y serait, probablement, resté jusqu’à la fin de ses jours, si le moine calabrais Barlaam, un aventurier original et un savant superficiel de l’époque de la Renaissance, complètement étranger à la vie spirituelle, ne s’était avisé, après un bref séjour à l’Athos, de lancer une attaque acharnée contre les moines contemplatifs de la Sainte Montagne pour leur occupation incessante à la prière de Jésus. Il se moquait de leurs pratiques psychotechniques et les appelait ironiquement » omphalopsychoi ". Par ce surnom, il insinuait que les moines croyaient que l’âme de l’homme siégeait dans le nombril ! Cette affirmation était, évidemment, mensongère. Barlaam en était venu à ces conclusions arbitraires sur la base de doctrines ascétiques mal comprises. Il les fondait sur les opinions de personnes ignorantes. Saint Grégoire Palamas avait alors abandonné sa solitude et entrepris de défendre l’enseignement ascétique hésychaste. La polémique dépassa très vite son fondement ascétique pour se concentrer sur des questions théologiques et métaphysiques, telles que la lumière divine incréée, la nature de la grâce, l’essence de Dieu (ousia) dans sa relation avec les énergies divines, etc. Certains théologiens contemporains reprochent à Palamas d’avoir délaissé la vie contemplative au profit de la polémique dogmatique22. Un tel reproche est injuste. Outre le fait que Palamas est intervenu dans la polémique dogmatique non de sa propre initiative mais sur l’insistance des autorités monastiques du Mont Athos, en agissant ainsi, il suivait seulement la voie traditionnelle des anciens Pères ascétiques, lesquels n’étaient jamais insensibles aux questions dogmatiques, si étroitement liées à la vie spirituelle. Des reproches semblables pourraient être adressés à saint Maxime le Confesseur pour son intervention dans la polémique antimonothélite ou à saint Théodore Studite pour sa défense de la vénération des saintes icônes. Les grands et saints ascètes n’étaient jamais indifférents à l’Orthodoxie, particulièrement quand ils estimaient que des doctrines hérétiques sapaient les fondements de la vie spirituelle. Or, c’était singulièrement le cas dans la situation évoquée. L’expérience mystique et tous les efforts ascétiques de l’homme sont privés de sens et perdent leur valeur si la lumière, qui éclaire le contemplatif dans son union avec Dieu, n’est pas réellement divine et incréée. La vie contemplative reçoit sa justification seulement quand, à travers elle, l’on atteint un contact direct avec la divinité ; seulement si la lumière, vue par le mystique, est identique par nature à la lumière de la Transfiguration qui illumina le Seigneur sur le mont Thabor. Tous les adversaires de Palamas — Barlaam, Akindynos, Nicéphore Grégoras, etc. — niaient ces fondements essentiels de l’expérience mystique authentique. Ce faisant, ils entraient en contradiction avec l’ancienne tradition patristique de l’Église orientale exprimée dans les œuvres d’un saint Grégoire le Théologien et d’un saint Jean Damascène, qui enseignaient que la lumière de la Transfiguration était la gloire de Dieu, la manifestation de la divinité23 " éternelle, infinie et incréée " — comme l’affirme résolument saint Jean Damascène dans son sermon sur la Transfiguration24. Nous n’avons pas l’intention de tenter d’exposer ici la discussion sur l’essence et les énergies divines, qui prit bientôt une place centrale dans ces débats. Elle appartient plutôt au domaine théologique ou même métaphysique qu’à celui de la vie spirituelle. Néanmoins, elle lui était étroitement liée. La différence entre l’essence inaccessible et inconcevable et les énergies incréées de la divinité, auxquelles l’homme peut communier, est traditionnelle dans la patristique orientale (cf. les Cappadociens, saint Jean Damascène, etc.). Elle fut seulement développée et exprimée plus complètement par Grégoire Palamas. Cela permit à ce dernier de fonder théologiquement et d’affirmer la réalité de l’union avec Dieu et de la " déification " selon la grâce, sans tomber dans une confusion panthéiste de la créature avec le Créateur. En même temps, la doctrine apophatique sur l’inaccessibilité de l’essence divine justifiait la voie mystique de l’approche de Dieu, a contrario de méthodes plus intellectuelles de certains cercles byzantins influencés par la scolastique occidentale.
Dans ce combat théologique, Palamas n’était pas seul. Il était activement soutenu par tout le Mont Athos. Nous pouvons ici indiquer le célèbre Tome Hagioritique, qui est une sorte de manifeste du mouvement hésychaste avec l’exposition de tous ses principaux points théologiques, rédigé au début de la discussion par le moine athonite Philotée Kokkinos, futur patriarche de Constantinople25. Il fut signé par les higoumènes de la Sainte Montagne lors d’une assemblée générale dans sa capitale, Karyès. Il est facile de comprendre le rôle du Mont Athos dans les affaires ecclésiales générales de cette période d’après le grand nombre de patriarches oecuméniques qui étaient, jusqu’à leur élection à cette charge, moines de la Sainte Montagne. Nous mentionnerons seulement certains d’entre eux, qui ont laissé une trace dans l’histoire de la spiritualité. Il y eut Calliste Ier, auteur de la Vie de saint Grégoire le Sinaïte26 et d’autres œuvres, inédites à ce jour. De même que Philotée Kokkinos (déjà cité), Juif baptisé, biographe de saint Grégoire Palamas et d’autres saints de cette même époque, ou le théologien assez remarquable27 Calliste II, profond écrivain mystique. C’est lui, probablement, qui composa à la fin du XIVe siècle, avec Ignace Xanthopoulos, un guide renommé de la spiritualité hésychaste28. Cette œuvre n’a pas perdu de sa signification et de sa vitalité jusqu’à présent. Elle est aussi intéressante en tant que témoignage du fait que la direction spirituelle sur la Sainte Montagne à cette époque est passée des grands monastères cénobitiques aux établissements monastiques plus modestes, dénommés skites, avec une vie semi-érémitique et des objectifs plus contemplatifs. Nous pouvons aussi associer aux écrivains athonites l’ancien empereur Jean Cantacuzène. Après son abdication, il s’est fait moine au monastère de Vatopédi sur le Mont Athos sous le nom de Joasaph. Outre une mémorable histoire de la période hésychaste, il a aussi laissé quelques traités théologiques d’une valeur qu’on n’attendrait pas des écrits d’un ancien empereur, même byzantin. Malheureusement, il faut dire que ces travaux sont, en grande partie, restés inédits.
II. Cette période du XIVe siècle constitue, indubitablement, l’époque la plus intéressante et la plus remarquable dans l’histoire spirituelle du Mont Athos. Malheureusement, elle ne sera pas de longue durée. Durant les premiers siècles de la domination turque, la Sainte Montagne ne fut en effet pas très active du point de vue spirituel. La sainteté continuait certes à y prospérer, et de nombreux saints sont apparus durant cette période : saint Nil (XVIIe s.), saint Hiérothée (XVIIe s.), saint Acace (XVIIIe s.) et d’autres. Mais nous ne savons pas beaucoup de choses à leur propos, car ils n’eurent pas la chance d’avoir d’aussi brillants biographes que leurs prédécesseurs de la période hésychaste. Un nouveau type de saints de l’époque turque est étroitement lié au Mont Athos : les néo-martyrs. C’étaient des chrétiens martyrisés par les Turcs pour leur confession de la sainte foi. Une grande partie d’entre eux étaient des moines athonites, d’autres furent inspirés par le martyre des moines. Les moines athonites enseignaient que le chrétien qui a renié sa foi et est devenu musulman (ce qui arrivait assez souvent en ces temps d’oppression) ne peut se contenter d’une repentance privée de l’apostasie, mais doit rejeter l’Islam et confesser ouvertement le christianisme face aux Turcs. Un tel rejet de l’Islam par un musulman était durement châtié par les lois turques : ceux qui agissaient ainsi étaient cruellement mis à mort. La doctrine hagiorite sur la nécessité de la confession ouverte a engendré beaucoup de martyrs. Certains la condamnaient comme demandant beaucoup trop de la nature humaine. Nombreux, cependant, furent ceux qui la mirent en œuvre. C’était l’expression de la fidélité des moines athonites à leur foi et du sérieux avec lequel ils considéraient les questions relatives au salut.
Une nouvelle période marquante commença au Mont Athos dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Elle se prolongea jusqu’à l’Insurrection grecque (1821) et peut-être même au-delà. La Sainte Montagne occupa de nouveau la première place dans la vie spirituelle du monde orthodoxe. Nous n’avons pas ici à l’esprit la fondation de l’Académie théologique sur le Mont Athos. Elle fonctionna pendant plusieurs années sous la direction d’un savant grec renommé du XVIIIe siècle, Eugène Voulgaris († 1816), un homme très digne avec des connaissances encyclopédiques, bien que plutôt éclectique et, peut-être, un peu superficiel29. Il combinait une fidélité aux dogmes orthodoxes et même aux traditions ecclésiales avec une attirance pour les idées des philosophes allemands du siècle des Lumières. Il n’est pas difficile de comprendre que son enseignement, imprégné de la philosophie de Wolff30 et assez éloigné de la tradition patristique, ait rencontré une forte résistance parmi les moines athonites, peut-être ignorants, mais se trouvant plus près des sources de la doctrine orthodoxe. Voulgaris fut obligé de quitter le Mont Athos et de partir pour la Russie, où il fut sacré évêque. En Russie à l’époque de Catherine II, il se trouva un milieu plus approprié qu’au Mont Athos. Son académie subsista peu de temps et fut remplacée par une école plus élémentaire.
Une plus grande importance doit être accordée au remarquable mouvement spirituel pour la renaissance des traditions monastiques originelles et le retour à une compréhension plus profonde de la vie spirituelle, qui eut lieu sur le Mont Athos à la même période. Il est lié aux noms de trois éminentes personnalités grecques : Macaire, ancien évêque de Corinthe, Nicodème l’Hagiorite et Athanase de Paros31. Macaire est un saint de l’Église orthodoxe. Récemment, nous avons appris avec une profonde satisfaction que le patriarcat œcuménique de Constantinople examinait également une proposition de canonisation de Nicodème l’Hagiorite32, figure fort respectée par tous les moines de l’Athos. Avec Macaire, il a lutté pour la restauration de l’ancienne tradition spirituelle contemplative, largement oubliée sur le Mont Athos avec le temps. Ils estimaient tous deux que la voie essentielle pour acquérir à nouveau un niveau spirituel élevé était l’étude des Pères ascétiques et mystiques, la pratique de la " prière de Jésus " et une communion plus fréquente aux Saints Mystères. La vie monastique et, plus largement, religieuse, de leurs contemporains était très éloignée de leur but, et ils durent mener une longue lutte pour la défense et la diffusion de leurs points de vue. C’est surtout leur appel à une communion plus fréquente qui rencontra beaucoup d’opposition, y compris sur le Mont Athos. Une vaste discussion animée commença. Comme cela arrive souvent, cependant, la controverse principale ne portait pas sur les questions les plus importantes — comme, par exemple, la " prière de Jésus " ou la communion fréquente — mais se concentra sur les points secondaires, à savoir s’il est permis faire l’office pour les morts le dimanche ? En général, l’Église orthodoxe consacre à la mémoire des défunts le samedi, car le samedi est le jour du repos. Cependant les moines d’un des skites, occupés pendant la semaine par la construction de leur église, avaient transféré l’office pour les morts au dimanche. Leur acte provoqua l’ire de certains groupes fanatiques. Nicodème et Macaire intervinrent pour défendre les moines qui commémoraient les défunts le dimanche, en démontrant que, pour les chrétiens, il n’y a pas d’incompatibilité entre la mort et la résurrection : la mort n’est plus pour eux un événement triste, et c’est pourquoi l’on peut se la rappeler également le jour de la joie. Leurs adversaires leurs eurent bientôt donné le surnom moqueur de " collyvades " (du mot " collyvo " : plat de grains de blé aux raisins secs, apporté à l’église et béni en mémoire des défunts). Ce surnom ironique donné aux partisans d’une vie plus élevée, rappelle celui d’" omphalopsychoi «, attribué par Varlaam aux hésychastes du XIVe siècle. Pour la défense de la communion fréquente, Macaire de Corinthe publia à Venise en 1777 un livre, qui fut suivi par d’autres écrits de Nicodème et d’Athanase de Paros. Tous étaient partisans d’une communion plus fréquente que ce qui était habituellement accepté par les moines et les laïcs de l’époque. D’autres personnalités, cependant, comme par exemple Néophyte de Cavsocalyvia, également moine athonite, étaient d’un avis opposé. Le patriarcat œcuménique se montra plutôt irrésolu dans cette discussion. D’abord, il approuva le livre de Macaire, mais plus tard le condamna, pour finalement rapporter sa condamnation et laisser la question ouverte. Un grand patriarche, saint Grégoire V (qui sera pendu par les Turcs en 1821), était un partisan convaincu d’une communion fréquente et soutint toujours ce mouvement. Il était étroitement lié à la Sainte Montagne, où il avait vécu nombre d’années en relégation. Il œuvra beaucoup à la restauration, dans les grands monastères athonites, de l’ordre cénobitique, qui pendant la domination turque avait été dans une large mesure remplacé par un système original appelé » idiorythmie «. Les principaux vœux monastiques — l’obéissance et la pauvreté —avaient été sensiblement affaiblis dans cet ordre non canonique, qui permettait aux moines de posséder des propriétés individuelles. L’» idiorythmie" contribua largement à la décadence spirituelle du Mont Athos. Jusqu’à nos jours, elle constitue l’un des aspects les plus faibles de la Sainte Montagne33.
Beaucoup fut également fait pour la restauration de l’ancienne tradition ascétique de la vie contemplative. Nicodème était un écrivain spirituel très fécond. Certaines de ses œuvres, comme, par exemple, Le combat invisible, témoignent d’une influence de la spiritualité occidentale, tandis que ses autres travaux ont une grande valeur, comme par exemple, Le gouvernail spirituel. Ce livre remarquable est intéressant en tant que tentative de développement de la pratique ascétique hésychaste. Mais l’œuvre littéraire la plus importante de cette époquee est, incontestablement, La Philocalie, remarquable recueil ascétique et mystique publié à Venise en 1782 par Nicodème l’Hagiorite et Macaire de Corinthe34. Ces " morceaux choisis " spirituels ont rendu accessible à de larges cercles du peuple orthodoxe, tant moines que laïcs, les meilleurs écrits des anciens Pères, portant surtout sur la prière mentale. Jusque là, ils étaient enfouis dans des manuscrits inédits des bibliothèques de l’Athos. Ce recueil fut très vite traduit en langues slave et roumaine. La Philocalie a fortement contribué au renouveau de la vie spirituelle et a permis de revenir aux traditions ascétiques authentiques dans tous les pays orthodoxes. C’est particulièrement vrai pour la Russie, où l’ouvrage fut largement répandu à travers de nombreuses éditions. La première traduction slave fut faite par Païssos Vélitchkovsky, éminente personnalité spirituelle du XVIIIe siècle. Russe d’origine, il est mort en Roumanie, où il passa la dernière partie de sa vie en tant qu’organisateur et supérieur de grands monastères. Nous avons entendu dire que l’Église roumaine examinait également la question de sa canonisation35. La vie de Païssos Velitchkovsky éclaire vivement la signification panorthodoxe du Mont Athos pour la vie spirituelle à cette période. Au départ, Païssos était moine en Russie. Insatisfait des conditions spirituelles de son temps dans les monastères russes, il partit d’abord pour la Roumanie, puis au Mont Athos à la recherche d’une vie spirituelle plus élevée. Mais même sur l’Athos, il fut déçu de ce qu’il trouva. C’était avant que le mouvement spirituel des " collyvades " ait eu le temps de porter ses fruits. Par la suite, cependant, il fit la connaissance de saint Macaire de Corinthe et d’autres saints personnages. Leur vie et leur travail de collation des œuvres des Pères mystiques pour l’édition de la Philocalie produisirent sur lui une impression profonde. Et dès que ce livre parut, il le traduisit en langue slave. Bien des études ont été écrites sur les maîtres spirituels russes, sur les startsy du XIXe siècle, particulièrement sur ceux d’Optino, mais on ne doit pas perdre de vue le fait qu’ils trouvent leur source d’inspiration au Mont Athos et dans les " collyvades " de la fin du XVIIIe siècle, avec saint Macaire de Corinthe au premier chef. À vrai dire, les startsy russes ont acquis plus d’influence sur la vie russe du XIXe siècle que les gérondas grecs dans leur propre pays. Ils avaient aussi plus de liens avec le monde intellectuel. Nous pouvons, par exemple, indiquer des personnalités comme Dostoïevski, Gogol, Kireevsky, qui furent fortement influencées par les startsy d’Optino. Néanmoins, quelque chose de semblable a aussi existé en Grèce. Deux éminents écrivains grecs modernes, Alexandre Papadiamandis († 1908) et Alexandre Moraïtidis († 1930), ont subi une forte influence des moines athonites, tant dans leur vie que dans leurs écrits36. Moraïtidis, surtout, était un homme profondément religieux. Son père spirituel était un moine athonite du nom de Dionysios. À la fin de sa vie, Moraïtidis s’est lui-même fait moine dans un monastère de son lieu de naissance, sur la petite île de Skiathos, non loin du Mont Athos. Parmi les écrivains russes, Constantin Leontiev, philosophe original et auteur de grand talent, avait, incontestablement, un relation plus forte que les autres avec l’Athos. Plutôt païen dans la première partie de sa vie, il est devenu un orthodoxe ardent, bien qu’original, après ses visites de la Sainte Montagne dans les années soixante du
III. Dans quel état spirituel se trouve à présent le Mont Athos ? Quelle place occupe de nos jours la Sainte Montagne dans la vie spirituelle de l’Église orthodoxe ? Je n’ai pas la prétention de donner une réponse satisfaisante à ces questions. Tant de personnes ont déjà, après une visite de courte durée, tenté d’y répondre dans leurs écrits. Et quand on a une longue expérience personnelle de quelque chose, il est parfois encore plus difficile de tirer des conclusions précises et a fortiori de pronostiquer l’avenir. Je me limiterai donc à quelques remarques.
Le Mont Athos vit à présent une crise aiguë et dangereuse, à l’issue incertaine38. Il y a beaucoup de raisons à cette crise, tant extérieures qu’intérieures. Malgré son isolement, la Sainte Montagne fait quand même partie du monde, et ce qui se déroule a l’extérieur influence également sa vie. L’expression la plus visible de cet état critique du Mont Athos est, évidemment, la réduction rapide de sa population monastique. Au début du vingtième siècle, avant la Première guerre mondiale, l’Athos comprenait près de dix mille moines. Maintenant, il y en a moins de deux mille. En soi, ce dernier nombre n’est pas si faible. Par le passé, comme, par exemple, aux XVIe-XVIIe siècles, il est arrivé que le Mont Athos possède le même nombre d’habitants. Ce n’est que durant sa première période (XIe-XIIe siècles), dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle (jusqu’à l’insurrection grecque de 1821) et au début du XXe siècle, que la population de la Sainte Montagne a atteint 10 000 moines et même plus. Néanmoins, la rapidité de la réduction du nombre des moines ces quarante dernières années est angoissante. Certaines des raisons de ce phénomène sont plutôt extérieures et même politiques. Le Mont Athos fut séparé par les circonstances historiques récentes de la plus grande partie du monde orthodoxe. Il fut coupé de la Russie dès la Première guerre mondiale et des pays orthodoxes des Balkans — hormis la Grèce — dès la Seconde guerre mondiale. Partant, l’Athos est devenu moins accessible pour les ressortissants de ces pays qu’il ne l’était dans le passé. La politique du gouvernement grec par rapport aux minorités nationales a encore aggravé ce processus d’isolation de la Sainte Montagne. De grandes difficultés ont été causées aux personnes d’origine non-grecque qui souhaitaient devenir moines dans les monastères athonites. Il faut avec regret remarquer que ces mesures ont causé du tort non seulement aux communautés slaves et roumaines, mais à la Sainte Montagne dans son ensemble. Le Mont Athos n’a jamais été dans l’histoire et ne peut devenir le patrimoine d’une seule nation. Il a toujours été le centre panorthodoxe du monachisme, accessible aux orthodoxes de toutes les nations. Nous pouvons ici rappeler le rôle significatif qu’ont joué au Mont Athos les Géorgiens (durant sa période la plus ancienne), les Serbes aux XIIIe-XVIe siècles (avec leur monastère historique de Chilandar), et les Russes au XIXe siècle39. Chacune de ces nations a considérablement contribué, sur les plans spirituel et culturel (sans parler de l’apport matériel), à la prospérité de l’Athos, sans lui ôter pour cela son caractère principalement grec. Un Mont Athos limité à une seule nation perdrait sa signification de centre panorthodoxe et tomberait rapidement en décadence. En réalité, le même processus de réduction de la population se déroule également dans les monastères grecs, bien qu’à plus faible allure. De nos jours, il n’y a pas un nombre suffisant des personnes venant pratiquer la vie monastique sur le Mont Athos ; et parmi celles qui viennent, une partie seulement reste réellement sur la Sainte Montagne. En outre, l’on constate ces derniers temps l’aspiration d’un certain nombre de moines à partir dans le monde pour le travail ecclésial. Quelles sont les raisons de ce triste phénomène qui n’existait pas dans le passé ? Avant tout, il faut remarquer l’affaiblissement général de la vie religieuse de nos jours, et une grande inclination parmi les croyants plutôt au travail missionnaire actif qu’à la vie contemplative. Les sévérités ascétiques du statut monastique athonite sont difficilement acceptées par les hommes d’aujourd’hui, particulièrement par ceux qui sont gâtés par le confort moderne. L’on ressent également un manque de direction spirituelle en général et de formation adéquate des novices dans certains monastères en particulier. Les déviations par rapport à l’ordre canonique et à la tradition patristique authentique qu’on retrouve dans la nouvelle organisation juridique du Mont Athos permettent de grandes injustices qui se reflètent d’une manière très nuisible sur la vie monastique (par exemple, sur les rapports entre les diverses classes de moines dans les monastères idiorythmiques, de même que sur les relations entre les monastères " souverains " et leurs " dépendances «, cellules et skites). Il y a aussi l’absence de formation théologique sur le Mont Athos et les difficultés rencontrées par les chercheurs qui voudraient se consacrer aux études théologiques dans les monastères. Toutes ces raisons et quelques autres ont pour conséquence que la population monastique du Mont Athos a été réduite essentiellement à des hommes âgés de plus de 50 ou même 60 ans. Il est difficile maintenant d’y trouver quelqu’un de moins de 30 ans. Dans les monastères non-grecs, il n’y en a pas du tout !40 L’absence de jeunes moines aptes au travail cause d’immenses difficultés aux monastères dans la célébration des offices religieux et tous les travaux monastiques en général. Encore plus lourdes sont les conséquences spirituelles nocives de ce phénomène (l’absence de jeunes moines) : la vie des monastères devient molle, oisive, décadente. On peut dire presque la même chose du manque d’hommes formés. Certes, le monachisme orthodoxe n’a jamais considéré la science et la connaissance comme le but ou la partie essentielle, ou même la justification de la vie monastique. Il fut toujours ouvert à des personnes de tous les états et niveaux de formation. Aucune différence n’a jamais été faite entre les frères formés ou peu cultivés. En agissant ainsi, les moines orientaux se trouvent plus près de l’esprit originel du monachisme ancien que certains ordres monastiques en Occident, qui ont introduit des distinctions entre les » pères " et les " frères «, fondées notamment sur la différence de niveau de formation. Néanmoins, quand la communauté monastique comprend presqu’exclusivement des personnes peu cultivées et qu’elles la dominent, cela ne peut être favorable à la vie spirituelle. Une telle situation peut même avoir des conséquences dangereuses dans le domaine de la préservation des traditions authentiques du monachisme. Combien différentes étaient les conditions dans le passé, quand l’Athos comptait parmi ses moines tant de personnalités si cultivées !
Et néanmoins, malgré ce qui vient d’être dit, le Mont Athos continue à occuper une place exclusive et irremplaçable dans la vie spirituelle de l’Église orthodoxe. C’est l’unique lieu où l’ancienne tradition monastique de l’Orient dans toute sa diversité constitue encore, jusqu’à nos jours, une réalité humaine vivante. Cette tradition y régit toute la vie et donne à cette terre son empreinte particulière. C’est l’un des rares endroits où l’office divin byzantin s’accomplit encore durant l’année liturgique dans toute sa richesse et sa beauté (dans les églises paroissiales et même dans les monastères en dehors du Mont Athos, nous ne pouvons d’habitude voir que des parties de l’office divin orthodoxe complet). La Sainte Montagne est, enfin, l’un des quelques lieux du monde où les écrits et l’enseignement des grands ascètes et mystiques de l’Église orthodoxe, comme Macaire le Grand, saint Jean Climaque, saint Syméon le Nouveau Théologien et d’autres, constituent non seulement l’objet d’études et de recherches purement théoriques d’un petit nombre de savants (patrologues et byzantinistes), mais forment une tradition spirituelle vivante, une réalité profondément vécue par tout notre être et qui constitue véritablement notre pain spirituel essentiel. Je me rappelle d’une conversation que j’ai eue au Mont Athos avec un professeur allemand. Il me demanda : » Quels types de livres lisent surtout vos moines ? " En réponse, je citai de nombreux écrivains ascétiques, dont saint Jean Climaque. « Comment ?, s’exclama avec surprise le professeur, chez nous seuls les gens les plus instruits sont capables de lire des œuvres comme celle de Jean Climaque ! Vos moines doivent être très cultivés «. Le professeur ne pouvait pas concevoir que, pour qui appartient à la tradition vivante de l’Église, il n’est pas besoin de grandes connaissances théoriques pour comprendre les écrits exprimant cette tradition. Et de fait, nombre de moines athonites peu instruits peuvent lire et saisir parfaitement non seulement le Climaque, mais même Isaac le Syrien, Syméon le Nouveau Théologien et d’autres Pères, ce qui est d’une grande importance, car cela signifie que l’ancienne tradition ascétique de l’Église orthodoxe est encore vivante au Mont Athos. Pour apprécier véritablement toute l’importance de ce phénomène, il faut se rappeler que la plupart des théologiens orthodoxes modernes ne connaissent guère la tradition ascétique. Ils ne manifestent pas envers le mysticisme orthodoxe cet intérêt théorique que nous voyons souvent chez de nombreux savants occidentaux. Assez souvent, ils ne connaissent pas même les noms des grands mystiques, vénérés comme des saints dans notre Église orthodoxe. Malheureusement, on peut dire presque la même chose de certains mouvements chrétiens modernes en Grèce et, je suppose, dans d’autres pays orthodoxes. Je pense à des mouvements comme Zoï (» Vie «), Aktines (» Rayons «) etc., qui consacrent leur attention au travail missionnaire, à la prédication et à la vie active en général. Il est indiscutable qu’ils ont accompli un grand et précieux travail dans leur domaine propre, mais leur éloignement de la tradition spirituelle orthodoxe de la prière mentale et de la vie contemplative donne en général à tous ces mouvements une certaine superficialité, laissant spirituellement insatisfaits nombre de leurs membres jeunes et sincères. C’est ainsi que je me rappelle comment un jeune diacre à Athènes, ancien moine de la Sainte Montagne, se plaignait à moi de ce vide spirituel qu’il ressentait dans son action en tant que membre d’un de ces mouvements chrétiens. » Et le pire, ajoutait-il, c’est qu’aucun de nos responsables ne me comprend ! " Il aurait été très heureux, par contre, de revenir au Mont Athos. Nous ne doutons pas qu’un lien plus étroit entre ces mouvements chrétiens modernes et la tradition spirituelle de l’Église orthodoxe pourrait grandement aider ceux-ci dans leur travail de restauration de la confession et la direction spirituelle parmi les laïcs. Ici, le Mont Athos pourrait jouer un rôle considérable.
Plus encore que la simple préservation de la tradition ascétique, les fruits spirituels de celle-ci ont une grande importance. Ils peuvent être brièvement définis comme la sainteté, qui constitue un don de l’Esprit Saint. En elle consiste la vraie justification de la vie monastique. Mais, peut-on se demander, est-il possible de trouver de nos jours de la sainteté sur le Mont Athos ? Il est très difficile de donner à l’homme contemporain une réponse objective à cette question. Le jugement définitif appartient à l’Église. Je puis seulement me permettre d’exprimer en quelques de mots ma conviction personnelle. Même aujourd’hui, il y a, au Mont Athos, bien des hommes de vie spirituelle élevée et de sainteté authentique. Durant les années que j’ai passées sur la Sainte Montagne, j’ai rencontré de nombreux pères de différentes nationalités, qui ont produit sur moi une profonde impression de présence évidente de la grâce du Saint Esprit. Ce fait est pour moi indiscutable. Et je puis ajouter qu’en dehors du Mont Athos, je n’ai jamais rencontré de personnes si évidemment illuminées par la grâce. Ces pères — les moines auxquels je pense — relèvent de divers types de vie monastique, i.e. ce sont tant des cénobites que des ermites. À titre d’exemple de saint homme, exhalant la grâce de l’Esprit Saint, je puis indiquer le moine du monastère de Saint-Pantéléimon, le père Silouane, décédé en 193841. Toute sa vie est marquée du sceau de la sainteté, qui s’exprimait dans sa profonde humilité et son amour des autres. C’était, peut-être, le seul homme de tous ceux que j’ai connus, qui ne jugeait jamais son prochain. Il avait assurément une très riche vie intérieure. Il possédait le don de la prière mentale ininterrompue. Paysan d’origine, sans aucune formation laïque, il avait acquis une sagesse spirituelle exceptionnelle. Quiconque avait la possibilité de s’entretenir avec lui s’en persuadait rapidement. Il était l’un de ces pères spirituels qui sont capables de dire à chacun précisément ce dont il a besoin. Après son décès, l’on a conservé ses cahiers, dans lesquels nous découvrons ses réflexions spirituelles et son expérience. La langue de ses écrits est, peut être, parfois malhabile, mais, malgré cela, ils produisent une impression très profonde par leur authenticité et leur caractère singulier. Il n’est pas rare qu’ils atteignent les hauteurs des anciennes œuvres mystiques des saints Pères. Après un contact personnel avec lui, d’aucuns ont éprouvé sa puissante et bienheureuse influence qui a changé radicalement toute leur vie ultérieure.
En conclusion, j’exprimerai l’idée que le rôle authentique du Mont Athos réside, avant tout, dans le fait de générer des figures de sainteté comme le fut (parmi d’autres) le bienheureux starets Silouane. Et tant que ce phénomène se poursuit, l’existence de la Sainte Montagne se justifie pleinement, et sa signification dans la vie spirituelle de l’Église orthodoxe universelle demeure fondamentale.
Traduit du russe par le père Serge Model.
© Serge Model. Tous droits réservés.
«Buisson Ardent — Cahiers Saint-Silouane l’Athonite» n°20, Paris, Cerf, 2014, p. 99-118.
Le Mont Athos dans la vie spirituelle de l’Église orthodoxe1
1 [Exposé présenté le 31 janvier 1952 à la réunion de la section d’Oxford de l’association anglicano-orthodoxe " Fellowship St Alban & St Serge «. Publié (en russe) dans le Messager de l’Exarchat du Patriarche russe en Europe occidentale, 12 (1952), p.
Archevêque Basile Krivochéine2
2 [Fils d’un ministre du tsar, engagé dans les armées blanches puis émigré à Paris, Basile Krivochéine
3 Une relativement bonne bibliographie sur le Mont Athos est donnée dans l’article » Athos " de C. Karalevsky, Dictionnaire d’Histoire et de Géographie Ecclésiastiques, 5 (1931), col.
4 L’étude la plus détaillée du statut juridique de la sainte Montagne peut être trouvée dans le livre de D. Petrakakos, L’État monastique de la Sainte Montagne [en grec], Athènes, 1925. Ce livre est un peu tendancieux au profit des monastères souverains. On peut voir la tendance opposée (au profit des petites communautés, les cellules) dans l’étude de Ch. Ktenas, Les institutions monastiques de la Sainte Montagne [en grec], Athènes, 1929 [Pour une étude récente : G. Papathomas, Le Patriarcat œcuménique de Constantinople (y compris la Politeia monastique du Mont Athos). Approche nomocanonique, Thessalonique, éd. Epektasis, 1998 (NdT)].
6 Par exemple, Karalevsky affirme, que le Statut (Canonisme) existant de la sainte Montagne (ratifié en 1926, texte publié chez Petrakakos, ainsi qu’en édition séparée) permet le libre passage des monastères cénobitiques à l’idiorythmie et l’inverse (col. 99). En réalité, seul le passage de l’idiorythmie au cénobitisme est permis, alors que la transformation des communautés cénobitiques en idiorythmiques est absolument interdite (art. 85 du Statut). Il est aussi incorrect d’affirmer que les monastères idiorythmiques évitent de tonsurer des " rassophores «, (un moyen terme entre le novice et le moine, sans vœux monastiques) (col. 104). Au contraire, les monastères idiorythmiques sont pleins de moines rassophores, qui restent dans cet état — semi-laïc et semi-monastique — toute leur vie. Dans les monastères cénobitiques grecs, le rassophore est un phénomène déjà plus rare. Dans certains monastères grecs, et particulièrement dans les petites communautés, dans les skites et les cellules, l’on rencontre souvent une tendance à conférer une seule tonsure monastique — » le grand schème «. Chez les Russes, par contre, le rassophore est un phénomène courant, mais considéré seulement comme une période d’essai, un stade temporaire de transition vers la tonsure. Les représentations de Karalevsky sur l’administration centrale de la Sainte Montagne sont encore plus fantastiques ; ainsi, il n’évoque pas du tout la » Sainte-Communauté " et à sa place mentionne à plusieurs reprises une " Grande-Épistasie " (col. 90) imaginaire, en tant qu’institution supérieure gouvernant le Mont Athos. En réalité, il existe une " Sainte-Épistasie " mais qui n’est qu’un organe purement exécutif, privé toute influence et initiative, de la " Sainte-Communauté " (la réunion des représentants des vingt monastères), qui est l’institution supérieure gouvernant la sainte Montagne, en commun avec la " Sainte-Synaxe biannuelle " des représentants des mêmes monastères, en tant qu’institution législative et judiciaire. D’une plus grande autorité encore est revêtue " la Double Sainte-Synaxe biannuelle «, où chaque monastère est représenté par deux moines. Il est intéressant de remarquer que le Statut de 1924 ne mentionne pas la » Double Synaxe «, en conséquence de quoi certains gouverneurs de l’Athos (nommés à Athènes par le Ministère grec des Affaires étrangères) ont tenté, dans leur ignorance de la tradition de la sainte Montagne, de contester la légitimité de la » Double Synaxe". Mais en réalité, cette " Synaxe " continue à exercer les plus grandes responsabilités sur la sainte Montagne.
7 R. Dawkins, The Monks of Athos, Londres, 1936. Voir recension de ce livre : B. Krivochéine, " Les Légendes de l’Athos «, Byzantion, 14 (1939), p.
8 Texte chez Ph. Meyer : Die Haupturkunden fur die Geschichte der Athoskloster, Leipzig, 1894, p.
9 Cf. H. G. Beck, «Die Benedictiner Regel auf dem Athos», Byz. Zeitschrift, 44 (1951), p.
10 La plus ancienne version de cette vita fut éditée par М. Pomialovsky, Saint-Pétersbourg, 1895 [Une autre version (abrégée) fut éditée par L. Petit en 1906 et traduite en français : La vie de saint Athanase l’Athonite, éd. de Chevetogne, 1963].
11 Cf. le texte grec chez : Kirsopp Lake, The Early Days of Monasticism on Mount Athos, Oxford, 1909, p.
12 P.G. de Migne, 150, col.
13 Le livre le plus récent sur lui est : Hermenegild M. Biedermann, Das Menschenbild bei Symeon dem Jungeren dem Theologen, Wurzburg, 1949. Comme tous les travaux précédents sur saint Syméon, il ne se fonde pas sur l’original grec de ses Catéchèses, qui n’est pas encore publié jusqu’ici, mais que nous espérons publier bientôt en collaboration le prof. J. Hussey. [Telle était la situation en 1952. Depuis, plusieurs ouvrages majeurs ont été publiés sur saint Syméon, dont une biographie fondamentale par Mgr Basile Krivochéine lui-même : Dans la lumière du Christ. Saint Syméon le Nouveau Théologien. Vie-Doctrine-Écrits, Chevetogne, 1980. Finalement, ce n’est pas avec J. Hussey mais avec J. Paramelle que Mgr Basile publiera, en 3 volumes, les Catéchèses de saint Syméon, dans la collection " Sources chrétiennes " des éditions du Cerf,
14 Sur l’histoire de la " prière de Jésus «, cf. Un moine de l’Eglise d’Orient, » La Prière de Jésus. Sa genèse et son développement dans la tradition byzantino-slave «, Irénikon, 20 (1947), p.
15 Nous trouvons un tel point de vue dans l’article de J. Hausherr : » Note sur l’inventeur de la méthode d’oraison hésychaste «, Orientalia Christiana, 20 (1930), p.
16 [Trad. fr. : Les homélies spirituelles de saint Macaire. Le Saint-Esprit et le chrétien, éd. Abbaye de Bellefontaine, 1984].
17 Pour l’original grec, cf. J. Hausherr, Orientalia Christiana, 9 (1927).
18 P.G. 147, col.
19 Par le métropolite Euloge (Kourilas) et F. Halkin dans Analecta Bollandiana, 54 (1936), p.
20 Traduction anglaise de ses œuvres (à partir de l’original syriaque) : Mystic Treatises by Isaac of Nineveh, Translated from Syriac Text by A. J. Wensinck, Verbandelingen der K. Akademies, Amsterdam, Nieuwe Reeks, Deel XXIII, Amsterdam, 1923 [trad. fr. (à partir de la version grecque) : Isaac le Syrien, Œuvres spirituelles. Les 86 discours ascétiques. Les lettres, Paris, DDB, 1981 ; Œuvres spirituelles II, éd. Abbaye de Bellefontaine, 2003 ; Œuvres spirituelles III, éd. Abbaye de Bellefontaine, 2009 ; Discours ascétiques, éd. Monastère St Antoine le Grand et Monastère de Solan, 2006 et 2011].
21 Nouveaux écrits sur Grégoire Palamas : 1) M. Jugie, » Palamas «, Dictionnaire de Théologie Catholique, 12 (1932), col.
22 Cf. l’article » La Prière de Jésus «, p. 388.
23 » Discours sur le baptême «, P.G. 36, col. 365 A.
24 Texte grec : P.G. 96, col. 565 A [trad. fr. : Saint Jean Damascène, » Homélie et acrostiche pour la fête de la Transfiguration de Notre Seigneur Jésus-Christ «, Joie de la Transfiguration d’après les Pères d’Orient, éd. de l’Abbaye de Bellefontaine, 1985, p.
25 P.G. 150, col.
26 Éditée par I. Pomialovsky, Saint-Pétersbourg, 1894.
27 Cf. l’intéressant article à son sujet de V. Laurent, Dictionnaire de Théologie Catholique, 12 (1934), col.
28 Texte grec : P.G. 147, col.
29 Cf. à son sujet : D.K. » Les initiateurs des sciences naturelles en Grèce " [en grec], Aktines, 6 (1943), p.
30 [Philosophe rationaliste allemand
31 Un article du plus haut intérêt sur cette période : G. Veritis, " Le mouvement orthodoxe des collyvades et les deux Alexandre de Skiathos " [en grec], Aktines, 6 (1943), p.
32 [Saint Nicodème l’Hagiorite fut effectivement canonisé par le patriarcat œcuménique de Constantinople en 1955].
33 [Aujourd’hui, cependant, tous les grands monastères du Mont Athos sont retournés au cénobitisme].
34 [Trad. fr. : Philocalie des pères neptiques, éd. Abbaye de Bellefontaine,
35 [Saint Païssios Velitchkovksy fut canonisé par l’Église orthodoxe russe en 1988 et l’Église orthodoxe roumaine en 1992].
36 Cf. Veritis dans la note supra.
37 Cf. à son sujet le livre de N. Berdiaev, Constantin Leontiev : Un penseur religieux russe du XIXe siècle [en russe], Paris, Ymca-Press, 1926 [trad. fr. : éd. Berg International, 1993].
38 [Telle était la situation du Mont Athos dans les années cinquante et soixante. À partir des années 1970, cependant, un véritable renouveau s’y est fait jour, avec l’apparition de grandes figures spirituelles — les pères Joseph l’Hésychaste, Ephrem de Katounakia, Païssios l’Hagiorite, Porphyre de Cavsocalyvia, Aimilianos Vafeidis ou Basile Gondikakis — et le repeuplement des monastères par de jeunes moines. Cf. notamment : Hiéromoine Macaire, " Le renouveau contemporain du Mont Athos «, Contacts, 233 (2011), p.
39 À propos des Russes à l’Athos, cf. A. Soloviev, «Histoire du Monastère Russe au Mont Athos », Byzantion, 8 (1933), p.
40 [Ces affirmations, vraies à l’époque de la rédaction de l’article, ne le sont plus aujourd’hui. Cf. n. 38].
41 Cf. le livre remarquable du père Sophrony, Saint Silouane l’Athonite